Des vertes et des pas mûres

Je passais en mairie en toute neutralité, pour une affaire neutre conformément à la personnalité de notre toute nouvelle secrétaire de mairie. C’est alors que je l’aperçus. Elle était là, disposée au beau milieu du mur, quatre punaises, rien autour, on ne voyait qu’elle : la toute nouvelle affiche du festival International du Point de croix et de la ruralité, deuxième édition.

Comment ? Pourquoi n’ai-je pas été appelée à participer à l’élaboration de celle-ci ? Moi qui ai été force de propositions lors de la première édition, qui ai eu l’honneur d’en réaliser l’affiche et le site dédié, qui ai suggéré une identité visuelle jusque dans la signalétique (proposition rejetée, rien de tel qu’un bon marqueur et une main appliquée)… Ma première réaction a été la colère, le bouillonnement : j’ai été volontairement évincée, c’est une trahison, une conspiration, un camouflet ! Mais heureusement ma grande ouverture d’esprit m’a permis de prendre de la hauteur et d’analyser les faits :

– réalité numéro 1 : je n’ai été conviée à aucune commission animation, mais il y a une excellente raison à cela qui m’a été rapportée par Marine, chargée d’inviter les membres concernés. Sa cousine porte le même prénom que moi, c’est donc tout naturellement qu’elle a envoyé toutes les invitations à celle-ci, qui ne devait rien comprendre la pauvre et a choisi de ne pas manifester son étonnement. Tout s’explique.

– réalité numéro 2, j’ai remis en question la pérennité dudit festival lors du débriefing qui a suivi la première édition. Alors que l’ambition de Val était d’en faire un évènement incontournable sur le territoire et au delà, j’ai brisé son élan en lâchant sans ménagement que monopoliser durant une année la totalité de l’équipe municipale pour n’avoir que 2 de nos administrés parmi les visiteurs, ça pouvait être mal perçu. J’ai aussi suggéré d’impliquer davantage les villageois dans la manifestation en mettant en valeur leurs œuvres, et j’ai terminé en proposant de réaliser moi-même le comptage lors de la deuxième édition. Pourquoi, à émis une Val tremblante ? Pour établir des statistiques sur l’origine géographique des ces fameux 700 visiteurs, et ajuster la communication par la suite pardi. Tout cela elle l’a mal pris, je le sais, c’est un fait…

– réalité numéro 3, je suis assez prise par le temps, et Val le sait. Je fais partie de la commission communication, certes, mais il m’apparaît évident maintenant qu’elle a souhaité préserver ma vie familiale et professionnelle. C’est tout à son honneur. Je la remercierai, je le ferai.

Allez, c’est oublié tout ça. Marine a retrouvé mon numéro, j’ai exposé mon point de vue, j’ai plus de temps pour mes cartes de vœux… Cela dit elle a quelque chose qui ne me plaît pas cette affiche. Le choix de la police (comic sans ms, celle-là…) ? L’élément central vert, sur fond vert, avec le nom du festival écrit en vert (foncé) ? Je suis pas fan du vert, voilà tout. Mais je suis quand même un peu verte.

La fois où j’ai craqué

J’ai une confidence à vous faire.

Ce blog ne doit pas son existence qu’à mon investissement dans ma mission et ma quête de savoir (attention, je ne remets rien de ces motivations en question, hein ?).

L’idée m’est venue après avoir vécu une situation surréaliste qui m’a profondément déstabilisée.

Les élections avaient eu lieu depuis peu, tout le monde prenait ses marques. Je fais partie de la commission communication donc je prends mon rôle très à cœur, et je lâche, radieuse, après un conseil « ce serait bien que j’aie les codes d’accès à la page dédiée à notre superbe commune sur le plus célèbre des réseaux sociaux ! » Val et Dory ouvre de grands yeux vides, je comprends assez vite que la barrière de la langue vient d’opérer. Néanmoins elles percutent en quelques secondes qu’à leur insu, une page portant le nom de notre commune est active sur FaceBook. Qui ? Qui est à l’origine de cette mascarade ? Bien sûr, je suis mandatée pour répondre à cette question, je n’avais qu’à pas soulever un tel lièvre. J’enquête, je trouve, et pas de chance il s’agit d’une charmante personne membre de l’unique association du village.

Puis les choses m’ont un peu échappé :

Monsieur Malchance a reçu une convocation, à laquelle il a répondu qu’il n’était pas dispo. La municipalité, avec plus de fermeté, a exprimé son mécontentement d’avoir eu connaissance de ladite page, en jetant, n’ayons pas peur des mots, le terme « d’usurpation d’identité ». Monsieur Malchance, bien décidé à avoir le dernier mot, a accusé notre chère Val de gaspiller l’argent de la mairie en procès inutile à l’encontre des citoyens (bon, il était énervé). Là, au sommet de la tension nerveuse, Val décide de réunir le conseil municipal afin de résoudre ce qui était devenu « l’affaire Malchance ».

– (Val) Je pense qu’il faut porter plainte. Si on ne le fait pas au nom de la mairie, je déposerai une main courante en mon nom. Ça peut aller loin : on peut lui faire vendre sa baraque. (Victor acquiesce)
– (Dory) On va le convoquer, maintenant il faut qu’il s’explique c’est grave ce qu’il a fait, c’est très grave !
– (Victor) Il faut rédiger un courrier plus ferme, lui exposant les risques qu’il encourt en terme pénal…

A ce moment-là, j’ai réalisé que tous ces gens, autour de la table, prenaient sur leur temps de vie pour discuter, l’air grave, d’un tout petit détail insignifiant. Je me suis rappelée qu’on parlait juste d’une page qui avait recueilli 30 « J’aime » et dont si peu de personne se souciait que c’en aurait presque été risible. J’observe leurs postures, leurs têtes qui opinent, je ne comprends plus personne, soudain.

– (M-J, au bord de l’explosion) Sinon, rappelons-nous qu’on ne parle que d’une page FaceBook, après tout, et que ce monsieur n’a rien fait d’illégal en voulant faire vivre son village ! Je suggère qu’on lui écrive plutôt un courrier le remerciant de son investissement, en lui précisant que nous souhaiterions que la gestion d’une telle page nous revienne, fin de l’histoire.

Un silence a d’abord accueilli cette tentative de désamorçage, mais Dory s’est vite ressaisie : « c’est grave, tu ne te rends pas compte M.-J. Il fait exprès de semer la confusion chez les villageois, il est malveillant, je le sais. On ne peut pas le laisser faire. »

Là, je ne peux pas expliquer ce qui m’est arrivé. J’ai baissé la tête, j’ai senti une nausée et des larmes d’impuissance monter (je sais, je prends tout à cœur) jusqu’au moment où Sylviane, apercevant mon trouble pose la question de trop « mais pourquoi ça te touche autant, M.J. ? » Explosion. J’ai eu l’impression de me retrouver enfant, désarmée et incapable de m’exprimer distinctement. Je suis sortie en m’excusant, honteuse de me donner ainsi en spectacle. Mes jambes m’ont lâchées, le souffle m’a manqué : crise de tétanie et spasmophilie. Rien que ça. Pour un détail insignifiant, j’avais bien conscience d’être dans l’excès total de réaction.

Après en être arrivée à ce stade, j’ai d’abord pensé que ce n’était pas pour moi, ce genre de responsabilités. Que j’allais probablement finir par mourir si je restais.

Concernant monsieur Malchance, il a fini par se présenter devant le bureau pour répondre de ses actes. Quand Bernard a fait le compte rendu de l’entrevue on l’entendait jubiler en disant «  il n’a pas fait le malin, il s’est excusé platement et a dit qu’il ne le ferait plus, tête basse »… La nausée m’est revenue mais j’ai récité mentalement des tables de multiplication, ça aide.

Je suis restée à deux conditions : donner mon avis, toujours, et écrire. C’est ma thérapie.

[Crédit photo de couverture: etaletaculture.fr] 

La mystérieuse obsession de Val

Allez, un petit billet d’humeur, mais pas de mauvaise humeur. Juste d’humeur à décrypter mon prochain.

Aujourd’hui, mon prochain c’est Val, la très volontaire maire de notre commune. Je viens de réaliser que Val nourrissait une obsession. Je vous raconte, chronologiquement :

Avril 2014, panique dans toute la France, on nous annonce une réforme des rythmes scolaires et personne ne sait comment on va pouvoir faire face. Val organise une réunion publique pour parler du problème, car elle est empathique vis à vis de tous ces parents dans la détresse. Elle propose, entre autres aménagements, de rallonger la pause méridienne de trente minutes, passant celle-ci d’une heure trente à deux heures. Proposition rejetée, « non » disent les parents « deux heures pour manger c’est refusé ».

Mai 2014, la solution miracle n’a pas été trouvée, Val lance une consultation : souhaitez-vous rallonger la pause méridienne de trente minutes, afin de terminer la classe à 16h15 au lieu de 15h45 ? Réponse : non, à une voie près selon l’organisatrice (nous on ne sait pas vraiment, les bulletins ont disparu).

Décembre 2015, Val arrive en commission école échevelée et nous apprend que, d’urgence, il faut résoudre le problème de la cantine, qui est beaucoup, beaucoup trop bruyante. Elle propose de rallonger la pause méridienne de trente minutes dès le mois de janvier, ce qui permettrait de mettre en place deux services. Pas bonne idée, osent les membres de la commission présents (des délégués de parents d’élèves, des enseignants, en plus des élus). Il serait en effet souhaitable de traiter les causes du désagrément en premier lieu, cela serait moins coûteux à long terme que de payer une demi-heure supplémentaire au personnel concerné. Pas bonne idée, répond également la majorité des parents d’élèves informés, qui paniquent au passage devant tant de précipitation. Ok, on réfléchit.

4 janvier 2016, Val rassemble l’équipe enseignante pour lui proposer de rallonger la pause méridienne de trente minutes. Les enseignantes répliquent alors que cet aménagement va à l’encontre du rythme de l’enfant, le temps de pause est trop long et une heure d’attente, que ce soit avant ou après le repas, serait contre productif pour les élèves. Val comprend, dit-elle, elle reverra sa copie et optera peut-être pour un quart d’heure seulement, ou alors rien. On se rappelle.

5 janvier 2016, Val convoque cette fois le personnel de cantine et explique que très bientôt, pour le bien des enfants, la pause méridienne sera rallongée de trente minute, permettant ainsi l’organisation d’un deuxième service. Mais madame le maire, se voit-elle opposer, comment pourrions-nous à la fois gérer des enfants à table et des enfants en standby dans la garderie ? Val n’a pas trouvé la réponse. Elle a dit « on mettra un film » mais elle a bien vu que ça n’était pas la bonne réponse. « Je vous tiens au courant ».

Février 2016, dernière commission école dédiée aux rythmes scolaires, Val nous informe que le bureau a décidé qu’il était inévitable de rallonger la pause méridienne de 30 minute, en vue de réaliser deux services. Là elle n’a eu aucune objection, plus personne n’en avait dans son sac.

Tiens, justement, le thème de la prochaine commission école c’est « organisation du temps scolaire et périscolaire ». Qu’est ce que ça peut bien être ?

Bref, en rapprochant tous ces faits j’en suis sûre à présent, il s’agit là d’une idée obsessionnelle.

Pourquoi ? Où veut-elle en venir ? Qu’est ce qu’elle essaie de nous dire ?

Je dois bien dire que quelque chose m’échappe dans cette affaire. Je vous tiens au courant.

Et vous, vous avez une idée ? Laissez-moi vos commentaires, et puis abonnez-vous pour recevoir les prochains articles !

Mutation

Que voilà une bien désagréable période… L’hiver approche, le moral descend et voilà qu’il y a du sang, de la mort, de la terreur, de la suspicion et de la laideur un peu partout. Et de la politique aussi. C’est le moment idéal pour lister ce qui est beau et qui sent bon autour de nous. Ça ne sert à rien mais beaucoup de choses vaines font vraiment du bien (lister aussi  les choses vaines qui font du bien à l’occasion).

Et voilà qu’au milieu de cette morosité, j’entends cette phrase « toute façon, bientôt y aura plus de maire ». Ce n’est pas la première fois que j’entends ça, mais là, tout de suite, ça m’a donné envie de vomir. Alors j’ai réfléchi. Pourquoi ça me fait peur, cette phrase, et pourquoi ils disent ça, les gens ?

Concrètement, ça signifie pour notre beau territoire : plus de Val. Plus de festival international du point de croix projets territoriaux enthousiasmants. Plus d’élections. Plus d’opposition féroce. Plus d’écharpe tricolore. Plus de PLU.

Alors j’ai cherché à me rassurer. Qu’est-ce qui peut bien leur faire croire, à ces Cassandre, que c’est la fin d’une époque ? En rassemblant les preuves, j’ai vu qu’il y avait matière à flipper. Oui, j’avais vu que les communautés de communes fleurissaient, s’étendaient, fusionnaient, qu’on parlait mutualisation, que les fonctions des communes diminuaient, comme leurs dotations… J’ai lu çà et là des articles disant tantôt que les maires sont des arriérés incompétents à l’égo surdimensionné qui grèvent le budget de l’état, tantôt que tout part à vau-l’eau ma pauvre dame, une commune sans maire n’est plus une commune, où va la France, et après les mairies nos écoles, c’est la mort des territoires ruraux etc…

Bref, je n’ai rien trouvé de concret, de sûr, de chronométré. Alors j’ai décidé de m’en battre l’œil. J’ai décidé de vivre dans le présent, à l’heure des commissions, des conseils municipaux, des gens pas contents, du clocher qui sonne toutes les heures, et des permanences de bureau de vote. En même temps, je n’ai jamais envisagé de faire carrière en tant que conseillère, niveau promotion sociale c’est trop limité. Et je salue chaleureusement tous ceux qui sont conseillers, adjoints, maires et qui ont pour seule ambition de faire de leur mieux.

Bisous à tous.

Silence radio…

Nous voilà en plein mois d’octobre.

Des dossiers à traiter, il y en a : des loyers impayés au niveau des bâtiments municipaux, des aménagements d’accessibilité pour être conforme à l’Ad’Ap, un bulletin municipal à rédiger (le dernier est paru en février, on est loin de la périodicité trimestrielle qu’on s’est fixé il y a fort, fort longtemps), un PLU à concevoir avant la fin de l’année (rien que ça)… Sans compter ceux dont je n’entends pas parler, allant de la querelle de quartier aux procédures judiciaires en cours.

Tout cela est désormais secondaire : la commune vibre au rythme du Festival International du Point de Croix* ! Et oui, notre Val, passionnée par le point de croix depuis ses plus jeunes années, s’est fait un devoir de faire rayonner notre municipalité à travers le monde et au delà grâce à un festival qu’elle monte de toute pièce et qui remplit intégralement sa vie (et celle de la mairie) !!! Broder, contacter des brodeurs, concevoir des affiches, essayer de créer un site internet dédié à l’évènement interplanétaire, rechercher des subventions et des partenaires, tout cela est effectivement chronophage et demande une disponibilité de tous les instants.

On fait quoi maintenant ? Pas de chance, Val est également dans la catégorie des omnimaires : elle a beaucoup de mal à déléguer (mais ce n’est pas un problème de confiance, non non) et considère tout ce qu’elle ne traite pas par elle-même comme nul et non avenu. Elle gère tout, écrit tout, supervise tout… et paralyse TOUT quand elle décroche.

la réalité n’est pas si éloignée que cela, même si je dois bien avouer que ça n’est pas le point de croix qui est au cœur de ce festival intergalactique…

PLU, pas PLU

Dans notre joyeuse mairie, il y a un fil rouge : c’est le PLU.

Dès la première réunion de début de campagne électorale, ce fameux PLU a été évoqué : « ce sera le plus grand chantier de ce mandat, le passage du POS (plan d’occupation des sols) en PLU (plan local d’urbanisme). Il faudra composer une équipe en charge de réfléchir aux possibles aménagements, on fera des trucs formidables, vous verrez, ce sera bien ce sera chouette… ».

La douce Mélanie était même pressentie, en tant qu’architecte, pour superviser tout cela vu qu’il ne faut rien laisser au hasard, c’est le dossier du siècle, etc, etc…

Ça c’était au début. Depuis il s’est passé un an, et quelques départs de conseillers. Le PLU a été relégué tout en bas de la pile sans qu’on comprenne pourquoi. Voyons :
-Le POS actuel sera bientôt caduc comme le prévoit la loi Alur : le 31 décembre 2015 !!
– Les coûts (énoooormes) ont été prévus dans le budget,
– Le RNU (règlement national d’urbanisme), c’est vraiment pas bien et c’est ce qui nous attend si nous n’agissons pas…

Alors, c’est quoi qui coince ? On y va, non ?

Ben non.

D’après Val, notre maire bien aimée, ce serait pure folie que d’engager des sommes folles dans la réalisation d’un tel plan puisqu’il est vaguement possible que la communauté de commune s’en charge. Mais la communauté de communes n’a pas l’air décidée, vu que les communes pourraient très bien s’en charger elles-mêmes (tic, tac, tic, tac…).

Personnellement, ça m’angoisse un peu quand ça n’avance pas. Donc je relance régulièrement, et on me répond « on attend ».

D’ailleurs notre Val a trouvé un autre os à ronger. On était beaucoup, ces dernières mois, sur la thématique du harcèlement de la part de l’asso locale, des investissements financiers que pourrait réaliser la commune, du PLU (ah non, tiens…)… Et depuis qu’elle s’est mis en tête de réunir toute la France sur notre territoire bucolique à l’occasion d’un festival du point de croix (pas tout à fait mais on n’est pas loin), rien d’autre ne compte que le point de croix.

On piétine, les gars, on piétine.